La vigueur de l'entreprise

lundi 31 octobre 2011 | 0 commentaires
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Ces dernières semaines, la monnaie canadienne a plongé sous la parité avec le dollar des États-Unis. Mais voilà que notre devise est maintenant de retour au-dessus de la parité (du moins au moment d’écrire ces lignes). Les États-Unis ont pris des mesures pour imposer une taxe aux voyageurs qui entrent dans leur pays. La Banque du Canada et la Réserve fédérale américaine pourraient augmenter les taux d’intérêts. Steve Jobs est mort et nous ne savons pas comment Apple s’en tirera sous un nouveau leadership.

Somme toute, ce sont des événements assez fades comparé à ce qui se passe ailleurs dans le monde. La Turquie vient juste de subir un tremblement de terre. Les finances du gouvernement européen sombrent dans le chaos depuis plus de deux ans. Mouammar Kadhafi aurait, semble-t-il, été exécuté après des mois de guerre civile en Libye. Les entreprises chinoises exploitent les idées des sociétés occidentales qui ont des installations de production sur leur sol. Nous vivons dans un monde turbulent et c’est pourquoi nous devons tous être aussi résilients et vigoureux que possible.

Je le dis depuis des années, mais cela vaut la peine de le répéter : personne ne peut prédire ce qui va arriver. Aussi, il est impossible d’essayer de créer plus de certitude. La seule solution consiste à développer ce que j’appelle maintenant « la vigueur de l’entreprise ». Celle-ci va au-delà de la simple résilience qui est la capacité à surmonter les erreurs et les perturbations. La vigueur d’une entreprise est sa capacité à survivre, voire à prospérer dans des environnements turbulents, en absorbant les chocs et en naviguant à travers la brume et les glaces flottantes pour arriver à la destination voulue.

Voici certains éléments qui contribuent à la vigueur d’une
entreprise :
•Utiliser la dette intelligemment pour investir dans le développement de l’entreprise, et non en créant un empire qui nourrit les égos de la haute direction et des propriétaires.
•Maintenir des réserves liquides pour survivre aux ralentissements de l’économie et investir dans les opportunités à court terme.
•S’entourer de personnes très compétentes.
•Se méfier des concurrents tout en restant axé sur le service aux clients existants et potentiels.
•Revoir périodiquement les procédés et les intrants pour être aussi efficaces et efficients que possible.
•Se rappeler que Rome ne s’est pas bâtie en un jour. Bien que les médias et un coup de chance occasionnel puissent rendre crédible l’idée d’un « succès instantané », la plupart des succès flamboyants ont été construits en réalité une brique à la fois, en appliquant méthodiquement quelques pratiques et principes de base.
•Dans une bataille, il faut toujours établir un camp de base sécuritaire d’où on peut diriger les opérations tout en envoyant des éclaireurs. Préserver l’intégrité de l’activité principale tout en expérimentant avec de nouveaux marchés, produits, technologies, ressources, etc. Cela permet d’apprendre tout en gérant les risques.
•On peut toujours tenter d’imiter les concurrents, mais tout succès durable appartient à ceux qui peuvent contourner la concurrence en redéfinissant les produits et les marchés. Par exemple, Apple n’a pas essayé de créer une imitation du BlackBerry, avec les mêmes caractéristiques de sécurité; à la place, Apple a recombiné le matériel et les logiciels existants pour créer le iPhone, qui est en réalité un ordinateur miniature tenant dans la main et misant sur le formidable pouvoir d’Internet, tout en servant aussi de téléphone.
•Rester à une longueur tactique d’avance par rapport à la concurrence en mettant constamment à niveau ses produits les plus populaires et en pénétrant plus profondément les segments du marché qu’on occupe et contrôle déjà.
•Conserver un état d’esprit proactif. Personne n’a jamais gagné une bataille ou une guerre en se terrant et en adoptant une mentalité défensive et paranoïaque. Un esprit proactif (en mode « offensive ») ne veut pas nécessairement dire être toujours en train d’attaquer. Il s’agit plutôt de gagner et de conserver l’initiative. Si vous ne l’avez pas, battez-vous pour l’avoir. Si vous l’avez, arrangez-vous pour la garder à tout prix.

Je viens de vous présenter quelques éléments de ce qu’il est nécessaire de faire pour être une entreprise vigoureuse et pour en adopter l’état d’esprit. J’en parlerai plus en détail au cours des prochains mois. Entre-temps, examinez votre situation pour voir où vous vous situez par rapport à ces principes, à la fois comme personne et comme organisation.

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Surveiller et contourner

lundi 3 octobre 2011 | 0 commentaires
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L’une des tactiques de base qu'un jeune officier militaire apprend est de « surveiller et contourner ». Cela fait référence au fait qu’en avançant vers l'ennemi, vous pouvez rencontrer des petites poches de résistance et des obstacles destinés à ralentir votre progression ou vous distraire de votre objectif principal. Alors un petit contingent reçoit l’ordre de garder un œil sur l’ennemi (surveiller), puis de contourner sa position pour poursuivre la mission principale. Cela suppose évidemment une marge de manœuvre autour de l'ennemi.

Chaque fois que je travaille sur un projet, l’un des miens ou celui d’un client, je constate la présence d’obstacles et d’une certaine résistance. Il est facile de se laisser distraire par ces entraves à la progression. Au mieux, ils sont de simples petits irritants. Mais ils peuvent aussi menacer les progrès réalisés, et même parfois la réussite de votre projet.

Par exemple, j'ai eu l’occasion de travailler sur un projet de stratégie avec un client. Quand nous avons commencé à travailler sur la mise en œuvre de son plan stratégique, plusieurs obstacles ont fait surface. Il s'agissait essentiellement de questions de propriété avec les partenaires et de répartition des frais pour les initiatives touchant la société mère et certaines de ses filiales. La plupart de ces problèmes n'étaient pas des obstacles, mais simplement des petits irritants. Il était facile de rester concentré sur l'objectif global tout en les mettant de côté. Par contre, d’autres problèmes se sont révélés plus importants et même critiques pour la mise en œuvre réussie de la stratégie. Qu’est-ce qui nous a permis de distinguer les petits irritants des obstacles critiques? En fait, il s’agissait de savoir si un problème donné pouvait nuire à la réussite de la mise en œuvre ou de la progression de la stratégie.

Se demander si un problème peut faire échouer un projet constitue la principale méthode pour déterminer sa gravité. Parfois, vous ne pouvez pas vraiment estimer l'importance relative d’un obstacle jusqu'à ce que vous ayez effectivement essayé de l’éliminer. C'est pourquoi il est essentiel pour vous et votre équipe de revoir souvent la pertinence des efforts déployés afin de ne pas vous laisser dévier de votre trajectoire.

Voici quelques questions que vous pouvez vous poser pour vous aider à déterminer si un obstacle est important ou s’il forme juste une éventuelle distraction :

•Que peut-il arriver si nous ne traitons pas ce problème? Que peut-il arriver si nous le traitons?
•Les effets potentiels sont-ils majeurs ou mineurs? Les effets peuvent-ils nous empêcher d'atteindre nos objectifs, maintenant ou dans l'avenir? Quelle est la probabilité de ces effets?
•Peut-on retarder la résolution de ce problème ou faut-il le traiter immédiatement? Risque-t-il de revenir nous prendre au dépourvu?
•Ces problèmes portent-ils sur la nature des objectifs ou simplement sur les moyens de les atteindre (particulièrement les ressources)?
•Quel est l'effet de se pencher sur ces problèmes? Est-ce que cela nous empêche d’aborder quelque chose de plus important ou de consacrer nos efforts à des activités plus rentables? En d'autres termes, est-ce le meilleur usage du leadership limité et des ressources de gestion à la lumière de tout ce qui doit être fait?

Après avoir déterminé si un obstacle est mineur ou peut être retardé, vous ne pouvez pas simplement l'ignorer. Vous devrez peut-être prendre des mesures préventives ou élaborer des plans d'urgence pour l’aborder s'il devient plus critique au fil du temps ou si la situation change. C'est pourquoi vous ne devez pas vous contenter de simplement contourner l'obstacle ou le problème, vous devez aussi le surveiller. Cela signifie de garder un œil sur lui, tout en étant prêt à agir si la situation change ou à atténuer ses effets jusqu'à ce que vous puissiez consacrer plus d'efforts à le résoudre.

Les obstacles et les enjeux peuvent parfois disparaître au fur et à mesure que le projet avance. Vous réalisez qu’une personne qui paraissait contre le projet ne l’est finalement pas, ou vous vous rendez compte qu’un problème n’était pas celui que vous pensiez. Nous disposons tous d’un degré limité d'énergie et d'attention que nous pouvons utiliser pour nous concentrer sur la réalisation d'un projet réussi ou mettre en œuvre une nouvelle stratégie, méthode ou approche. Nous avons besoin de garder nos ressources pour ce qui est vraiment important afin de ne pas être pris au dépourvu lorsque des problèmes et des obstacles surgissent. Voilà pourquoi l’habitude de « surveiller et contourner » doit faire partie du répertoire de chaque leader et gestionnaire.

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La divergence d'opinion vous rend mal à l'aise?

jeudi 1 septembre 2011 | 0 commentaires
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Une divergence d’opinion n’est pas toujours une mauvaise chose. Oui, cela peut gruger l’énergie et la détermination des gestionnaires, des entrepreneurs et des employés, miner leur moral et leur efficacité. Mais une divergence d’opinion peut aussi relancer la discussion, créer une saine rivalité, identifier les problèmes à résoudre et stimuler l’énergie créatrice des parties prenantes pour arriver à des solutions novatrices. La clé est de gérer le conflit plutôt que d’essayer de l’éviter.

Voici ce qui se passe quand vous essayez d’éviter un conflit. Le malaise subsiste en cachette. Il génère un sourd ressentiment et des rivalités malsaines. Des gens qui n’ont rien à voir avec le problème ont l’impression de devoir prendre partie au risque d’être ignorés quand des décisions importantes seront prises. Il est préférable de garder un œil sur les divergences qui peuvent dégénérer en conflit, voire les mettre à jour si elles menacent de se transformer en bourbier.

Il est inutile d’essayer d’éviter les divergences d’opinion. Chaque fois que deux personnes ou plus se rencontrent dans le but de réaliser quelque chose d’important, il y a inévitablement des désaccords sur les objectifs, sur ce qui est important et sur la meilleure façon d’atteindre le but. Conséquemment, les divergences peuvent se manifester à propos des valeurs (le pourquoi), des objectifs (le quoi) et des moyens (le comment).

Une partie de mon travail auprès de mes clients porte sur l’identification et l’analyse de problèmes qui, s’ils sont ignorés ou mal gérés, peuvent facilement dégénérer en conflit malsain. Je dois également affronter des conflits réels ou potentiels dans ma vie personnelle. Parfois d’autres personnes sont concernées, mais il peut très bien s’agir d’un malaise intérieur, quand l’harmonie est rompue entre mes valeurs, mes objectifs et mes approches. Quand vous travaillez à résoudre, à réduire ou, dans un sens plus positif, à canaliser un conflit vers une fin plus productive, la première étape consiste à identifier les intervenants en désaccord. Qui sont les personnes directement opposées? Y a-t-il d’autres personnes qui peuvent être indirectement affectées par cette situation? À quel point?

La deuxième étape est de déterminer si le différend porte sur des valeurs, des objectifs ou des moyens. Si la divergence d’opinion vise des valeurs, il pourrait s’avérer impossible de rapprocher les parties. Si c’est une question d’objectifs, les chances sont meilleures d’en arriver à un commun accord. Cela implique généralement une question de priorités, parce qu’il n’y a jamais assez de ressources et de temps pour atteindre tous les objectifs tout de suite. Parfois, il est préférable de les placer dans une séquence temporelle, ou d’allouer des ressources en tenant compte de l’importance ou de la criticité de l’objectif. Si les parties s’entendent sur les valeurs et les objectifs, alors la seule source importante de conflit est une divergence d’opinion sur les moyens à employer pour atteindre les objectifs.

On entend souvent parler de « conflit de personnalités », quand deux personnes ont supposément tellement d’antipathie l’une envers l’autre qu’elles ne peuvent travailler ensemble pour résoudre leurs différends. Je conviens que les incompatibilités de caractère existent, mais dans la plupart des cas, ces « conflits de personnalités » sont symptomatiques de conflits plus profonds provenant d’un manque d’harmonie entre les valeurs, les objectifs et les moyens. En d’autres mots, les conflits de personnalités sont habituellement l’effet d’un conflit sur le fond, non la cause.

Quand je travaille avec d’autres pour les aider à résoudre ou gérer des conflits, je commence toujours par demander à chaque partie quels sont ses objectifs ou quel résultat lui semble être dans son meilleur intérêt. Qu’est-ce que cette personne recherche. Si le conflit est très acerbe, il peut être nécessaire de parler à chacun séparément. Toutefois, il est préférable d’interroger chacun en présence de l’autre quand c’est possible. La règle de base étant qu’ils doivent écouter l’autre sans l’interrompre. En pratique, il peut y avoir beaucoup d’émotion dans l’air, et parfois aussi le besoin de se défouler et de dire ce qu’on pense de la position de l’autre. C’est correct. En autant qu’on donne des faits et des exemples concrets et qu’on n’essaie pas d’imputer des intentions à l’autre partie. Mettre l’accent sur les objectifs et les résultats a comme principal avantage de donner un contenu descriptif à des concepts théoriques ou à des hypothèses. Cela démontre à tous ceux qui sont concernés qu’il s’agit de réaliser quelque chose, et que cela va au-delà de la personnalité de quelqu’un ou de la raison présumée de ses agissements. Autrement dit, les objectifs sont tangibles et peuvent être atteints. Tandis qu’il est toujours voué à l’échec d’essayer de changer la personnalité d’autrui. Quand les positions de départ sont connues, nous pouvons commencer à travailler sur la solution du problème. Dans beaucoup de cas, pour ne pas dire la majorité, je trouve que le terrain d’entente est supérieur à ce que les parties sont prêtes à admettre au départ. Je constate souvent que les gens disent presque la même chose mais en des termes différents, ou encore qu’ils accordent plus de poids à certains facteurs ou critères.

La chose importante à ne pas oublier dans tout cela, c’est que les gens s’accrochent à leurs opinions pour des raisons valables à leurs yeux. Il ne sert à rien de dénigrer les valeurs, les buts ou les approches des autres parce qu’ils vous semblent un peu moins rationnels que les vôtres. La solution consiste à se baser sur la valeur extrinsèque des énoncés et à rechercher un terrain d’entente. Il arrive parfois que les éléments résiduels de la mésentente soient insurmontables et que la meilleure solution soit une séparation temporaire ou permanente. En pratique, toutefois, les désaccords résiduels peuvent habituellement être mis de côté pendant un moment, alors qu’on travaille à régler le conflit principal ou à mettre en place des mécanismes pour contrebalancer les problèmes restants ou les minimiser par rapport à l’ensemble du projet.

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Au-delà de la prochaine colline

mardi 2 août 2011 | 0 commentaires
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Il y a quelques semaines, j’écrivais ceci sur mon blogue (www.exploitingchange.com) : Chez les militaires, on enseigne aux jeunes officiers et sous-officiers à penser « au-delà de la prochaine colline ». Ce qui signifie que vous ne pouvez pas vous concentrer seulement sur le prochain objectif, le prochain bond tactique (un objectif intermédiaire de mouvement) ou le prochain instant. Vous devez constamment penser à ce qui peut arriver ensuite. Vous devez aussi penser à ce qui peut ou ne peut pas se produire à la suite de vos décisions et de vos actions. C’est un peu comme les bons joueurs d’échecs, les bons joueurs de billard et les bons golfeurs, qui pensent constamment aux coups d’attaque et de contre-attaque qui suivront le prochain coup.

Ce type de pensée anticipatoire est différent de la planification de contingence. La planification de contingence consiste à prévoir des situations et des événements qui sont dans une large mesure indépendants de nos propres actions et qui sont intrinsèquement incertains. Par exemple, l’effet potentiel de la météo sur un projet de construction. La pluie et le beau temps peuvent affecter la vitesse de construction d’une route, mais aucune planification ne peut influencer les conditions météorologiques. D’un autre côté, il est possible de prendre des mesures pour atténuer les effets potentiels de la météo et optimiser les conditions de réussite du projet de construction. C’est le domaine des plans de contingence.

En contrepartie, chaque fois que nous avons affaire à des humains, nous entrons dans un monde complètement différent qui exige un autre type d’anticipation. Quelqu’un a dit un jour que la différence entre les sciences naturelles ou exactes (par ex., la physique, la chimie, l’ingénierie, etc.) et les sciences humaines est semblable à la différence entre donner un coup de pied à un rocher et à un chien. Les différences sont qualitatives plutôt que quantitatives. Il est évident que nous sommes dans des domaines complètement différents de la connaissance et de la pratique.

Ce type d’interaction exige une prévoyance dynamique, c’est-à-dire l’habileté non seulement d’anticiper, mais de le faire en se basant sur ses propres « mouvements » ainsi que sur les buts, les motivations et les intérêts de l’autre personne. Chaque fois que vous négociez, vous devez envisager l’éventail de réponses et de réactions possibles à vos offres, et préparer vos propres réponses éventuelles. Ce type de dynamique de mouvement et contremouvement (attaque et contre-attaque) peut se dérouler sur plusieurs cycles.

Je pousserais ce concept plus loin en faisant remarquer que cela relève entièrement du domaine de la stratégie. Souvent, en conversant, les gens invoquent leur stratégie pour expliquer comment ils ont accompli quelque chose alors qu’il n’y avait aucune possibilité de réponse intentionnelle. Par exemple, vous pouvez dire que vous avez une stratégie pour creuser un trou, mais en réalité le sol n’a aucunement l’intention de résister à votre action. Il existe des facteurs éventuels, comme la météo, mais aucune autre personne ne participe au creusage. Par contre, chaque fois que vous interagissez avec d’autres êtres humains qui ont leurs propres objectifs, intentions et motivations, vous êtes nécessairement dans le domaine de la stratégie. La capacité de prévoir leurs réactions et leurs réponses longtemps d’avance est essentielle pour atteindre vos buts.

Quels que soient vos objectifs, la voie la plus sûre pour réussir vos interactions stratégiques consiste à déterminer dès le départ si vous êtes en situation de conflit, de concurrence ou de coopération. Beaucoup d’interactions stratégiques échouent parce que les personnes concernées ne réalisent pas que les gens agissent et réagissent différemment selon le ton de l’interaction, particulièrement quand ils perçoivent que leurs intérêts fondamentaux sont en jeu. Par exemple, des négociations peuvent prendre un tournant très différent si vous vous sentez en conflit ou en compétition (gagnant-perdant) ou en coopération (gagnant-gagnant). Certains leaders essaient de motiver les membres de leur personnel en les mettant en compétition les uns contre les autres, alors qu’il faudrait plus de coopération. Cela peut s’envenimer si le leader suscite un conflit entre les membres d’une même équipe.

Encore plus d’inefficacité pourrait découler de l’attitude d’un leader qui traiterait les gens comme des objets, plutôt que comme des êtres vivants qui respirent, qui ont des motivations, des aspirations et des intérêts pouvant parfois beaucoup différer. Il faut de la lucidité et de l’intuition pour comprendre les personnalités, les comportements et les émotions. Il faut également être capable de prévoir les conséquences de ses interactions, non seulement dans l’immédiat, mais encore plus loin « au-delà de la prochaine colline ».

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Les organisations sont constituées de personnes

jeudi 2 juin 2011 | 0 commentaires
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Dans l’infolettre du mois dernier, j’abordais la nécessité d’être spécifique lorsqu’il s’agit de formuler une stratégie et de planifier sa mise en œuvre. Je faisais remarquer qu’une des clés du succès consiste à désigner une personne responsable de cette mise en œuvre. Ce mois-ci, j’aimerais élaborer un peu plus sur cet aspect de la gestion dont l’applicabilité dépasse la simple stratégie.

Un des cours pour l’obtention de ma maîtrise portait sur le développement organisationnel. Le manuel de cours s’intitulait « L’aspect humain des organisations », ou quelque chose du genre. Je me souviens d’avoir demandé au professeur quel autre aspect d’une organisation pouvait-il bien y avoir. Il est resté interloqué puisque, a-t-il admis, il n’avait jamais abordé cette question auparavant. Mon point était simple : les organisations sont constituées de personnes et rien d’autre. Pendant une période donnée au cours d’une journée, elles se rassemblent pour résoudre des problèmes ou atteindre des objectifs communs, mais l’organisation en tant que telle, de même que ses procédures et ses flux de travail et d’information, n’ont pas d’existence au-delà de la convention sociale. Autrement dit, les organisations sont des formes d’interaction humaine. Elles n’ont pas d’existence dans le monde autrement que par les gens qui les constituent.

Chaque fois que vous voulez qu’une chose soit faite, vous devez la faire avec la coopération ou dans le respect des autres. Le chef d’une compagnie ou de toute autre sorte d’organisation doit travailler avec les autres pour élaborer une stratégie et des plans, pour mettre en œuvre les plans et faire un suivi auprès des membres, clients et autres parties intéressées. Nous parlons de « l’organisation » faisant cela et « du service » faisant telle chose, mais ce que nous voulons vraiment dire est « ce groupe de personnes fera ceci à un certain moment donné de façon à obtenir ce résultat avec d’autres personnes ». C’est l’essence de la science de l’organisation et de la gestion.

Et tout revient à une question de leadership, d’influence, de communication, de négociation et d’autres formes d’échanges. Vous pouvez avoir la meilleure stratégie et les meilleurs plans du monde, s’ils ne sont pas formulés de manière à susciter l’engagement et la coopération, les personnes qui doivent les exécuter ne le feront pas. Vous pouvez disposer des meilleurs processus, systèmes et équipements du monde, si les gens qui acceptent de faire partie de « l’organisation » ou de « l’équipe » ne les utilisent pas, alors « l’organisation » n’en retirera rien.

Chaque fois que je travaille avec mes clients à la formulation d’une stratégie et à l’établissement d’un plan d’action, j’affirme très clairement qu’une personne doit être responsable, et ce, pour chacune des initiatives. Il faut qu’une personne soit nommée à la tête de l’équipe pour chacun des objectifs et des résultats souhaités. Il ne suffit pas de dire « l’équipe est responsable » ou « le comité décidera ». Les organisations gouvernementales ont la réputation de créer ce type d’environnement où la responsabilité est dispersée et insipide. Cela émane de l’aversion pour le risque des personnes qui sont attirées par les emplois dans la fonction publique, ainsi que des structures politiques qui découragent (et parfois punissent) les gestes non autorisés ou la prise de risques. Il y a bien quelques braves au gouvernement qui sont disposés à prendre des risques et à mettre en jeu leur réputation pour exercer un leadership, mais ils sont relativement rares.

Dans le secteur privé, toutefois, nous sommes souvent témoins du contraire. Le propriétaire d’une entreprise présume tout simplement que parce qu’il a décrété que quelque chose va arriver, ce sera le cas. Les entrepreneurs qui connaissent le succès ont tendance à avoir une confiance infaillible en leur capacité de faire avancer à peu près n’importe quel projet ou changement, mais ils tendent également à trop se fier sur la force de leur propre conviction. Dans plusieurs cas, ils font tout eux-mêmes parce qu’ils pensent qu’on ne peut pas faire confiance aux autres pour faire les choses correctement. Il s’ensuit que les employés de nombreuses petites et moyennes entreprises hésitent à prendre des initiatives, non parce qu’ils ne peuvent pas ou ne veulent pas, mais parce qu’ils savent que leurs décisions risquent fort d’être infirmées par le patron. Un autre effet de cette attitude est que les petites entreprises finissent par avoir peu ou pas d’effectif de réserve pour prendre l’organisation en main quand le propriétaire désire ou est obligé de prendre sa retraite, souvent en raison de son âge ou de problèmes de santé.

Il reste une position mitoyenne entre ces deux extrêmes. Si vous acceptez qu’une organisation soit constituée de personnes, vous devez également convenir que ces personnes sont essentielles pour que les choses s’accomplissent. Vous pouvez consulter et essayer d’atteindre un consensus sur les fins, les voies et les moyens. Mais à un moment donné, quelqu’un doit décider pour l’organisation. Quand la décision est prise, alors quelqu’un doit élaborer un plan, créer des structures, des systèmes et des processus pour mettre en œuvre le plan, le communiquer ou émettre des directives aux membres de l’équipe, quelqu’un doit ensuite superviser et contrôler les entrants et les extrants pour atteindre l’objectif.

Tout repose sur les « personnes », les processus et les structures d’interaction qu’elles utilisent, les compétences et les influences des leaders officiels et non officiels, le travail collectif vers des objectifs communs. En réalité, il n’y a qu’une dimension à l’organisation, c’est la dimension humaine. La meilleure façon de perfectionner votre personnel est de lui confier des responsabilités et l’autorité nécessaire pour arriver à des résultats.

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Pas de stratégie sans spécificité

dimanche 1 mai 2011 | 0 commentaires
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La stratégie gagne toujours à être précise. La spécificité est encore plus importante quand on planifie et met en œuvre la stratégie. L’un des rôles clés d’un leader stratégique consiste à progresser à partir d’affirmations générales jusqu’à l’expression de l’intention spécifique, puis de passer au plan concret de mise en œuvre.

Songez au Débarquement en Normandie de 1944. Eisenhower n’a pas dit « On va débarquer quelque part en Europe en espérant que tout se passe bien ». Lui et son personnel ont décidé du pays précis où aurait lieu le débarquement, du laps de temps précis pour accomplir cette tâche, de la région précise et des plages précises pour servir de tête de pont. Il a aussi assigné des tâches précises à des unités précises à des moments précis et à des dates précises. Ils devaient aussi atteindre des objectifs précis dans un laps de temps précis. Les directives précises d’Eisenhower étaient alors successivement transmises le long de la chaîne de commandement, tout en devenant de plus en plus détaillées et précises. Naturellement, rien n’a fonctionné exactement selon le plan, mais le fait que les Alliés aient pu arracher à l’ennemi ces plages et mettre en place une tête de pont témoigne de la capacité d’Eisenhower et de son personnel à fixer des objectifs précis et à donner des instructions précises à des gens précis.

Je trouve que les propriétaires d’entreprises et les cadres supérieurs confondent trop souvent, « être spécifique ou être précis » avec la microgestion ou le sens exagéré des détails. Ils ne veulent pas être accusés d’être sur le dos de leurs employés. C’est une préoccupation valable, mais injustifiée si la stratégie et les directives sont trop vagues ou trop générales pour se traduire par des actions probantes.

Nous voyons trop souvent des énoncés de mission comme « être le fournisseur principal de X ». Qu’entend-on par principal? Comment définissez-vous ce concept? La mission devrait préciser ce qui différencie votre entreprise ou votre organisation. Un énoncé de mission est souvent la meilleure façon de résumer et de véhiculer la vraie valeur et le positionnement d’une entreprise. Prenons par exemple l’énoncé de mission de Google : « La mission de Google est d’organiser l’information du monde et de la rendre universellement accessible et utile ». Cela énonce clairement la valeur que cette société apporte et ses principaux avantages concurrentiels, sans toutefois donner de détails sur comment elle le fait, car cela aura de toute manière tendance à changer rapidement.

Une autre faiblesse des stratégies et des plans stratégiques est de dresser une liste d’objectifs sans nécessairement préciser comment ils seront atteints. J’ai souvent entendu dire que la stratégie concerne le « quoi » et non le « comment ». Mais, c’est une erreur à mon avis. Pour élaborer une stratégie valable, vous devez spécifier comment vous allez différencier vos services et vos produits de ceux des autres, quels sont vos avantages concurrentiels, ce que les clients trouvent uniquement chez vous et comment vous allez entreprendre cela en termes généraux. Vous devez aussi spécifier vos priorités au niveau des objectifs et les ressources que vous utiliserez pour les atteindre. Enfin, vous devez spécifier les compétences et les capacités majeures qui seront nécessaires pour exécuter la stratégie, sinon vous risquez de vous retrouver avec une brillante stratégie que vous ne pourrez pas mettre à exécution. Autrement dit, la stratégie exige une spécificité; mais une spécificité différente de celle requise aux niveaux opérationnel et tactique de la mise en œuvre.

La chose la plus difficile à faire est de passer de la stratégie et des objectifs stratégiques à un réel plan de mise en œuvre. Selon mon expérience, il y a trois exigences incontournables pour réussir la mise en œuvre. D’abord, vous devez identifier ce que vous allez faire concrètement pour atteindre les résultats stratégiques voulus. Par exemple, si vous décidez d’étendre vos services à l’ouest, vous devez identifier un premier emplacement, puis créer un plan opérationnel pour donner suite à cet élément particulier de la stratégie.

Le deuxième ingrédient essentiel au succès de la mise en œuvre consiste à établir les buts qui s’y rattachent et un délai d’exécution. Les buts peuvent être axés sur les résultats, par exemple une augmentation de 10 % des ventes d’ici un an. Mais ils peuvent aussi être basés sur les données : identifier et présélectionner trois nouveaux emplacements d’ici le 1er juin, et ensuite prendre une décision avant le 1er juillet sur l’emplacement idéal pour s’agrandir. Comme vous le remarquerez, ce sont des objectifs précis, déterminés de la même manière que ceux du Débarquement en Normandie : d’abord, quel pays, ensuite quelle région, ensuite quel endroit spécifique, puis avant quelle date.

Le dernier élément d’une mise en œuvre réussie est de confier la réalisation de l’objectif à une personne donnée. Autrement dit, une personne doit être responsable; si ce n’est par voie hiérarchique ou juridique, du moins que ce soit un leader et un champion qui verra à la réalisation du projet. J’ai toujours été très en faveur d’assigner à une personne donnée la responsabilité d’agir et d’obtenir des résultats. Plutôt que de vagues affirmations d’intentions, vous obtenez une approche axée sur l’action. Plus la tâche sera difficile, plus cette personne doit être à la hauteur.

En résumé, la stratégie et les plans stratégiques doivent être suffisamment précis pour englober les principaux différentiateurs de l’organisation, ses avantages concurrentiels et son positionnement. De plus, vous pouvez être spécifique sans entrer dans les détails. Laissez les détails à ceux qui doivent mettre en œuvre les divers éléments de la stratégie, à ceux qui sont responsables d’atteindre les objectifs.

© 2011 Richard Martin. Permission accordée de reproduire et citer à des fins non commerciales en mentionnant Richard Martin comme l’auteur de ce texte.

RIM doit jouer avec ses forces et non ses faiblesses

lundi 18 avril 2011 | 0 commentaires
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Research in Motion lance le PlayBook cette semaine. Déjà, les critiques négatives pleuvent. Il n'y a pas assez d'applications. Le PlayBook ne peut être utilisé qu'avec un BlackBerry. Le calendrier et le courriel ne sont pas perfectionnés. Etc.

Toutes ces critiques manquent quelque chose d'essentiel. C'est que, à l'instar du BlackBerry, le PlayBook va probablement être l'ordinateur tablette le plus sécuritaire. Il devra donc intéressé d'emblée les entreprises et organisations pour qui la sécurité des données est essentielle. On peut difficilement imaginer qu'une banque ou n'importe quelle institution qui doit transmettre et traiter des données personnelles de façon mobile ne soit pas minimalement curieuse d'essayer le PlayBook.

Ainsi, RIM joue avec ses forces plutôt que ses faiblesses. C'est la seule façon qu'elle pourra survivre dans un environnement informatique de plus en plus centré sur les ordinateurs tablettes.

Richard Martin est président et fondateur d'Alcera Conseil de gestion inc. Il met à profit son expérience de leadership militaire et d'affaires pour les cadres et organisations qui souhaitent exploiter les changements, maximiser les opportunités et minimiser les risques.

© 2011 Richard Martin. Reproduction et citation permises avec attribution.

Cessez de prévoir, commencez à expérimenter!

dimanche 17 avril 2011 | 0 commentaires
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Il devient de plus en plus évident pour moi que le véritable secret de la réussite n'est pas de faire des prédictions exactes, mais plutôt d’agir en expérimentant différentes approches et en consolidant celles qui semblent bien fonctionner. La réussite découle d’essais et d’erreurs, et de l’emploi d’idées qui marchent, plutôt que de la seule croyance en la prescience et la perspicacité. Il est également utile d'avoir une bonne dose de résilience et des réserves pour faire face aux crises inévitables qui peuvent apparemment surgir de nulle part.

Pourquoi est-ce que je dis cela? Eh bien, plus je regarde le monde des affaires, l’économie, la société ou la politique, moins je crois que quelqu'un sait réellement ce qui va se passer ensuite. Il suffit de prendre la plus récente crise au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Qui, le 1er janvier 2011, a prédit que les populations arabes éclateraient en signe de protestation et de rébellion plus tard dans le mois? Qui a vu que ce mouvement se propagerait et entraînerait la chute des dictateurs Hosni Moubarak en Égypte et Ben Ali en Tunisie? Qui a vu qu'un soulèvement populaire en Libye se transformerait en guerre civile et que les puissances occidentales commenceraient à bombarder le pays pour appuyer les rebelles?

© 2011 Richard Martin. Permission accordée de reproduire et citer à des fins non commerciales en mentionnant Richard Martin comme l’auteur de ce texte.
Nous pourrions continuer ainsi pendant longtemps. Oui, certains d’entre vous diront que des voix dans la nature parlaient de l’imminence de la crise populaire dans les pays arabes. Il en va de même pour les pronostics avant la crise financière en 2007 et 2008. Nous pouvons dire la même chose à propos de n'importe quelle crise en rétrospective. Mais le point important, c’est que peu de gens écoutent ces voix pessimistes, et encore moins de gens agissent en fonction de leurs pronostics.

Plus je travaille avec des cadres supérieurs et des entrepreneurs prospères, plus je réalise que leur réussite n'est pas le résultat de prédictions sur ce qui pourrait se passer ensuite. Au lieu de cela, ils ont investi leurs ressources en essayant des approches et des idées différentes. Une définition d'un entrepreneur – et cela pourrait s’appliquer à n’importe quel aspect de la vie, pas seulement les affaires – c'est quelqu'un qui réaffecte les ressources des secteurs de faible productivité aux secteurs de forte productivité. C'est vrai, mais il est également intéressant de constater que les véritables entrepreneurs sont des gens qui ne prétendent pas nécessairement savoir où sont les secteurs de forte productivité. Ils se disent « essayons ceci et voyons ce qui se passe ». Lorsqu'ils voient que quelque chose fonctionne, ils ajoutent des ressources et voient si cette chose peut continuer à croître pour devenir un important secteur d’activité ou une initiative de premier plan. Lorsque l'idée perce, ils injectent encore plus de ressources pour qu’elle devienne un secteur d’activité viable.

Autrement dit, les entrepreneurs prospères ont une façon de tirer profit des événements fortuits. Ils procèdent par tâtonnement, puis renforcent les expériences qui réussissent. Ils n'essaient pas de prédire l'avenir, car même s'ils croient cela possible, ils préfèrent investir dans un système offrant une plus grande probabilité de réussite, en sondant et empruntant le chemin de la moindre résistance.

La coqueluche des entreprises modernes est, bien entendu, Apple Inc. Il est facile de regarder en arrière avec le recul et de dire que Steve Jobs pouvait deviner dans quelle direction allaient les tendances du marché et les goûts des consommateurs. Mais en réalité Apple a beaucoup expérimenté avec différents produits et services au fil des décennies. Tout le monde connaît l'iPad aujourd'hui, mais qui se souvient de l'ordinateur de poche Newton? Le Newton s’est avéré un échec (excepté pour certains irréductibles de l’appareil), mais Apple a beaucoup appris de cette expérience. Rappelez-vous quand Apple a lancé l'iPhone en 2007? Il n'y avait aucune caméra ni App Store. Ils ont mis le produit sur le marché pour voir ce qui se passerait. Ils auraient pu croire qu'ils avaient un gagnant, mais ils n'en étaient pas vraiment sûrs jusqu'à ce que les ventes décollent et que ce produit devienne un objet cool à posséder. C’est seulement en 2008 qu’est apparu l'App Store, et c'est ce qui a permis à l’entreprise de bâtir un écosystème autour de l'iPhone, ce qui a propulsé les ventes et la notoriété du produit. Voilà un parfait exemple de l'approche que je préconise ici. Non pas prévoir, mais plutôt expérimenter.

Une grande partie de la documentation sur la stratégie et la gestion des affaires dit exactement le contraire. Des livres comme Built to Last, Good to Great, Blue Water Strategy, et d'autres dans le même genre, ne sont que des fables. Ils racontent et vendent des histoires au sujet de stratèges et d’entrepreneurs prospères qui étaient prescients et qui possédaient la recette du succès. Malheureusement, la plupart de ces recettes ne peuvent pas être reproduites, sont propres aux entreprises et à leurs dirigeants, ou sont figées dans le temps et l’espace. Ces modèles n’ont aucune application universelle.

Par contre, les essais et les erreurs, l’expérimentation, la recherche d’ouvertures et le fait de suivre le chemin de la réussite (et de la moindre résistance) ont fait leurs preuves. Cette méthode nécessite peut-être un peu plus de culot que de tenter de suivre la recette de quelqu'un d'autre, mais elle permet de créer sa propre recette du succès. Mieux encore, elle permet d’élaborer de nouvelles recettes à mesure que les circonstances changent sur le plan mondial.

Les trois niveaux de leadership

lundi 28 février 2011 | 0 commentaires

L’un des défis auxquels font face de nombreux gestionnaires et leaders porte sur la distinction qu’ils doivent faire entre plusieurs niveaux de leadership. Bien que partageant une base théorique et pratique commune, le leadership tactique et le leadership stratégique ont des exigences tout à fait différentes. De plus, il y a un aspect du leadership – le niveau opérationnel – dont beaucoup de gens ignorent même l’existence.

Leadership tactique

Le leadership tactique se préoccupe du ‘ici’ et du ‘maintenant’, avec des décisions à court terme et une gestion du risque axée sur des gains immédiats. Au niveau tactique, les leaders doivent trouver un équilibre entre les besoins des membres de l’équipe et les besoins de la mission ou de la situation. Cela exige souvent de négocier et d’amadouer les gens pour les amener à coopérer afin d’atteindre le but visé. Cela signifie aussi de créer un environnement où ils accepteront de faire des sacrifices ou de contribuer aux efforts communs en raison de leur loyauté au leader et aux autres membres de l’équipe.

Le leadership tactique est donc fortement transactionnel. C’est parce que le leader ne dispose pas de nombreux outils transformationnels. Des études ont démontré que les leaders transformationnels efficaces sont une source de motivation inspirante, de considération individualisée, de stimulation intellectuelle et d’influence idéale. Les trois premiers facteurs dépendent en grande partie du but et des objectifs généraux de l’organisation, ainsi que de sa culture et de son mode d’opération, lesquels dépendent du leadership stratégique et opérationnel. Au bout du compte, ils sont bien au-delà de l’influence du leader tactique qui travaille au front. Le seul facteur sur lequel le leader tactique peut exercer réellement un certain contrôle est son niveau d’influence idéale, autrement dit, son charisme.

Leadership stratégique

Le leadership stratégique se rapporte au but et aux objectifs à long terme d’une organisation, un mouvement ou une institution. Un leader stratégique vise à créer une organisation viable qui sera capable de fonctionner en toutes circonstances, qui sera résiliente et, encore mieux, solide face aux menaces et aux obstacles. Les leaders stratégiques peuvent recourir aux punitions et aux récompenses transactionnelles pour atteindre les visées de leur organisation, mais ces dernières n’ont habituellement qu’un effet à court terme et peuvent même s’avérer contre-productives à la longue. C’est pourquoi il est beaucoup plus efficace et efficient de bâtir un leadership stratégique basé sur les facteurs transformationnels.

Avec une vision et une mission convaincantes, le leader stratégique attirera les bonnes personnes, celles qui s’engageront pour atteindre les buts et les objectifs à long terme de l’organisation, fournissant ainsi la motivation intrinsèque nécessaire face aux difficultés et aux reculs. Cela favorise aussi un environnement stimulant où les gens peuvent grandir et déployer leurs talents et habiletés en réalisant les objectifs organisationnels. Les membres de l’organisation sauront que leur contribution est appréciée et qu’ils forment une partie essentielle de l’équipe.

Parce qu’ils croient aux valeurs et aux buts de l’organisation, et qu’ils croient que leurs leaders ont à cœur leurs meilleurs intérêts, ils seront prêts à faire des sacrifices pour le bien de l’institution. Cela sert également à protéger le moral.
Bien qu’un leader stratégique doive proposer une vue idéalisée de l’avenir et de l’organisation, il n’est pas nécessaire qu’il soit très charismatique. En fait, cela peut s’avérer un fardeau trop lourd en regard de ce que cela peut rapporter, car tout le monde devient alors dépendant de la présence continue du leader. C’est souvent le cas des entrepreneurs ou de ceux qui créent un mouvement. La transition du leadership stratégique à la phase « post héros » peut être chaotique.

Leadership opérationnel

Les leaders opérationnels sont les héros oubliés des organisations. Pourquoi? Parce qu’ils créent les structures et les systèmes qui permettent d’atteindre la vision et les objectifs des leaders stratégiques, tout en procurant un cadre de travail pour agir sous l’inspiration des leaders tactiques. Autrement dit, ils créent des systèmes pour appuyer les valeurs de l’organisation et son leadership, et encourager une culture et des modèles de comportement congruents.

Par exemple, une organisation qui valorise le travail d’équipe et la collaboration du groupe plutôt que les contributions individuelles a besoin d’un système de récompenses qui appuie cette visée. Si une équipe atteint un résultat important grâce à l’efficacité de son travail, alors toute l’équipe doit être reconnue et récompensée, et non pas les membres à titre personnel. Cela ne requiert pas nécessairement des récompenses financières; nous savons que les augmentations de salaire et les bonis ont une vie très courte. Les récompenses intrinsèques, comme une plus grande reconnaissance de l’équipe, un positionnement concurrentiel ou des projets plus intéressants et fondamentaux peuvent être très efficaces à long terme en créant des équipes hautement motivées qui affichent une grande cohésion et un moral élevé. Cette approche de l’efficacité opérationnelle doit imprégner toute l’organisation et tous ses systèmes, structures et processus de soutien. De plus, la continuité, la congruence et la cohérence doivent faire partie des facteurs de la dynamique organisationnelle. Il n’est pas bon que les récompenses soient différentes d’un projet à l’autre ou d’une équipe à l’autre, ni que les équipes n’aient pas les outils et le soutien des systèmes appropriés pour réussir les tâches et les fonctions qu’on leur confie.

Cela exige beaucoup des leaders opérationnels. Ce sont eux qui doivent diriger les équipes en analysant et comprenant les réalités stratégiques et tactiques de l’organisation. Ils doivent bâtir l’infrastructure de soutien et le cadre de travail qui permettront à chacun d’avancer de manière tactique vers la réalisation de la stratégie de l’organisation grâce au cadre de travail opérationnel des processus, systèmes, structures et mesures incitatives. Pour ce faire, les leaders doivent comprendre la nature des affaires de l’organisation, ses caractéristiques techniques et financières, de même que ses contraintes. Bien plus, ils doivent avoir une compréhension intime des avantages et des désavantages des approches transactionnelles et transformationnelles du leadership.

À quel niveau de leadership vous situez-vous? Répond-il correctement aux besoins de votre fonction et de l’organisation? Compte tenu des descriptions précédentes du leadership tactique, stratégique et opérationnel, vous pouvez mieux comprendre votre propre leadership, mais aussi celui de ceux qui font partie de votre entourage. Vous pouvez aussi mieux vous adapter aux besoins de la situation et de l’organisation.

© 2011 Richard Martin. Reproduction et citation permises avec attribution.

Les compagnies devraient sonder le occasions plutôt que de foncer à tête baissée

samedi 8 janvier 2011 | 0 commentaires

« …les entreprises démontrent depuis quelque temps une tendance déplorable à se précipiter plutôt qu’à d’abord sonder le terrain. »
Igor Ansoff, Corporate Strategy

Igor Ansoff a été l’un des pères de la stratégie commerciale. Il a écrit cette phrase en 1965, mais elle est tout aussi pertinente aujourd’hui. Il faisait évidemment référence au fait que beaucoup d’entreprises (sinon la majorité) ont tendance à se lancer dans des changements stratégiques majeurs sans nécessairement savoir dans quoi elles s’engagent. C’est ainsi que nous avons connu des vagues de fusions et d’acquisitions, des bulles de surinvestissements et diverses manifestations de mimétisme économique, financier et commercial.

L’approche « au diable les risques » fonctionne souvent si vous êtes le premier dans un nouveau secteur, mais comment en être sûr? Comment savez-vous que ce que vous tentez fonctionnera? Et qu’en est-il si vous êtes un joueur déjà bien établi et prospère? Allez-vous tout laisser tomber pour vous aventurer dans l’inconnu? Qu’arrivera-t-il si vous n’avez pas toutes les informations pour prendre des décisions éclairées face à l’avenir?

Ne rien faire ou adopter une attitude exagérément défensive est de toute évidence inefficace à long terme. Mais il en est de même pour ce qui est de plonger tête première en territoire ennemi. Existe-t-il une position mitoyenne responsable et réaliste? Je le crois. Elle consiste à avancer comme une troupe militaire, en sondant le terrain avec précaution, prêt à soutenir le succès et à exploiter les percées décisives.

Quels sont les principes de l’expérimentation?

Vous apprendrez davantage en agissant et en essayant des choses qu’en restant immobile. On a tendance à ne pas bouger et à défendre sa position quand on ne sait pas où aller ou quoi faire. Malheureusement, cela rend vulnérable face à un changement rapide du marché et aux menaces des concurrents. Sonder graduellement un nouveau marché ou une nouvelle catégorie de produits ou de services vous donne le temps d’apprendre et d’ajuster votre approche sans surinvestir au départ. Vous aurez aussi la possibilité de reculer si vous avez fait une erreur ou mal jugé la situation, ce qui peut se produire assez souvent.

Avancez sur un front large (ou plus large). Vous feriez mieux d’envoyer des éclaireurs pour vous renseigner sur le terrain et les positions ennemies pour ensuite y engager plus de forces au besoin. En affaires, cela peut signifier tenter plusieurs petites « expériences » avec de nouveaux produits ou marchés pour voir ce qui arrive et ensuite conserver celles qui ont réussi.

Ne mettez pas tous vos œufs dans le même panier. Si vous ne pouvez pas faire des prédictions précises au moment opportun, et si vous ne savez pas ce qui va réussir à long terme, il serait alors raisonnable de diversifier vos investissements et vos actifs. Cela ne signifie pas que vous devez devenir un conglomérat. Il est préférable d’expérimenter de manière contrôlée en marge de vos affaires, tout en utilisant les profits des produits et services actuels pour alimenter le travail exploratoire.

Toujours « couvrir » ses déplacements. Quand j’étais un jeune officier d’infanterie, on m’a enseigné à « couvrir » les déplacements de mes forces avec un groupe d’appui immobile au cas où je me retrouverais sous le feu ennemi. C’est pareil en affaires. Il est préférable d’avancer graduellement dans un nouveau marché ou lorsqu’on tente une nouvelle stratégie tout en maintenant le gros de sa position actuelle. C’est la stratégie des petits pas. Cela peut paraître trop lent pour certains, mais cela peut être réalisé avec une rapidité remarquable si vous maintenez la pression en procédant à des changements cumulatifs de manière délibérée et constante.

Soutenez le succès avec des forces d’appoint. Continuons avec l’analogie militaire. Une fois que vous avez traversé les premières lignes ennemies, vous engagez des ressources pour appuyer la percée initiale. Il en va de même avec vos efforts expérimentaux en affaires. Si une ou plusieurs de vos tentatives sont probantes, vous pouvez y investir de nouvelles ressources ou transférer des ressources d’un secteur d’activité existant afin de mieux vous positionner pour l’avenir.

Conserver des réserves pour tirer profit du succès. Tous ces principes exigent un certain niveau de ressources, d’abord pour expérimenter et ensuite pour soutenir le succès en investissant dans ce qui fonctionne. Cela exige de conserver des réserves financières ou d’avoir accès à du capital, soit en empruntant d’un secteur d’activité existant ou auprès de nouveaux investisseurs.

L’idée d’expérimenter en sondant prudemment le terrain au lieu de se lancer à tête baissée est, selon moi, l’un des concepts les plus puissants qu’une entreprise puisse adopter pour demeurer pertinente sur le marché à long terme. C’est une manière de répondre au besoin d’une stratégie offensive en saisissant et en conservant l’initiative, tout en maintenant une position défensive par précaution. En d’autres mots, l’expérimentation est l’essence de la prise de risque prudente.

© 2011 Richard Martin. Reproduction et citation permises avec attribution.