Les leçons de leadership de la saga « Carbo »

jeudi 12 mars 2009 | 0 commentaires

Il y a parfois des situations très publiques qui nous permettent de soutirer des leçons de vie ou de travail de façon prégnante. La saga « Carbo » et les récents insuccès des Canadiens de Montréal nous présentent une occasion pour observer le leadership en action, presque comme une expérience de laboratoire.

Ce qui est devenu apparent dans les derniers jours avec le congédiement de Guy Carbonneau c'est que son style de direction et de leadership ne correspondait plus aux besoins de l'équipe et aux attentes des joueurs. Par ailleurs, il semblait incapable de leur communiquer ses intentions de façon à en soutirer le meilleur effort possible.

Voici quelques-unes des leçons de leadership que l'on peut soutirer de cette histoire, leçons que l'on peut, je crois, appliquer en toutes circonstances :

· Il faut comprendre la distinction entre le leadership formel et informel. La plupart des journalistes semblent mal comprendre la distinction entre les deux formes de pouvoir et de leadership, soit formel et informel. Le directeur général et l'entraîneur en chef d'une équipe de hockey professionnelle sont avant tout des gestionnaires. Ils exercent un pouvoir et un leadership formel. Le capitaine et les assistants d'une équipe de hockey sont des leaders informels et leur pouvoir est conséquemment informel. Le pouvoir formel confère une autorité légale, financière ou morale d'agir et de décider en vue de l'atteinte d'objectifs organisationnels précis. Le pouvoir informel - et le leadership informel - exercé par un capitaine d'équipe ou tout autre joueur qui « se lève dans la chambre » n'ont qu'une portée limitée, tant physiquement que temporellement. C'est aux leaders formels d'une organisation que revient la responsabilité de diriger en vue de l'accomplissement de sa mission et non les leaders informels.

· L'importance clé de la communication. C'est au gestionnaire ou au dirigeant d'établir le ton dans une organisation. Le ton est en grande partie une fonction directe de la qualité des communications entre le dirigeant et ses subordonnés. Il semblerait que Guy Carbonneau était incapable ou ne voyait pas la nécessité de communiquer personnellement avec chaque membre de l'équipe. Or, lorsque j'étais officier militaire, je me faisais un devoir de parler de façon habituelle avec chaque personne sous mon commandement. C'est la meilleure façon de s'assurer que le message passe et que les gens comprennent ce que l'on tente d'accomplir et le rôle qu'ils ont à jouer dans cette mission. C'est aussi la meilleure façon d'apprendre à les connaître et d'avoir le pouls de l'organisation.

· Tous doivent connaître leur rôle. Il n'est pas nécessaire de mettre tout un chacun sur un piédestal, mais il est essentiel que chaque membre d'une organisation connaisse sa place et son rôle dans le fonctionnement de la machine. Ce message doit passer par l'emploi que l'on fait de la personne au jour le jour, mais aussi par les rencontres d'un à un entre le dirigeant et le subordonné. Il ne suffit pas d'afficher un mémo sur un babillard ou d'envoyer un courriel pour que tous les joueurs connaissent leurs tâches et leur rôle. Il faut en plus leur parler et expliquer le fonctionnement de la machine au complet.

· Il faut créer un climat de respect mutuel. Un chef formel doit absolument avoir le respect de ses subordonnés. Il peut tenter de l'imposer en instaurant un régime de terreur ou bien il peut amorcer un échange entre égaux. Ceci ne veut pas dire que le dirigeant et le subordonné sont égaux sur les plans de l'autorité et du pouvoir, mais plutôt en tant que personnes. Selon mon expérience, il y a deux ingrédients essentiels pour se faire respecter des autres. Le premier est tout simplement de traiter les autres avec respect et dignité. Ceci demande d'être attentif à leurs besoins, de leur expliquer le pourquoi des décisions (sauf dans des cas extrêmes de danger ou d'urgence), de leur adresser la parole avec respect et décorum, si la situation l'exige. Le deuxième facteur est de se comporter avec dignité et en affichant son amour propre. Ceci ne veut pas dire qu'il faut être hautain ou ne pas rire de ses propres bévues, mais plutôt qu'on ne peut pas s'attendre au respect des autres si on se ridiculise en public ou qu'on démontre un manque de contrôle émotionnel.

· Le chef ne peut pas tout connaître, mais il doit savoir mobiliser les autres pour trouver des solutions. En dernier lieu, il est impératif qu'un dirigeant démontre en tout temps qu'il est en contrôle de la situation. Certes, il arrive parfois qu'il ne connaisse pas toutes les réponses ou qu'il lui manque des informations importantes. Par contre, dans ces circonstances il doit démontrer qu'il a une méthode pour trouver les réponses et les informations manquantes. Il vaut mieux admettre d'entrée de jeu aux subordonnés qu'il y a des données manquantes que de tenter de leur cacher cette vérité. Il est possible aussi de réunir les membres clés de l'organisation (ou l'équipe entière) afin de demander leur avis et des suggestions pour améliorer les performances ou, encore, de se sortir d'un marasme quelconque.

Beaucoup a été dit durant les derniers jours sur le leadership de Guy Carbonneau en tant qu'entraîneur en chef des Canadiens de Montréal. Pour la plupart, les gens semblent comprendre de façon intuitive que la communication est au cœur même des responsabilités d'un dirigeant. Par contre, il faut réaliser que la communication n'est pas un objectif en soi du leadership, mais plutôt une façon privilégiée d'établir le respect mutuel, la compréhension de la mission de l'organisation et du rôle de tout un chacun, et puis de résoudre des problèmes difficiles et de relever les défis dont peut être confrontés toute organisation.

© 2009 Richard Martin. Tous droits réservés.

Chance ou malchance?

mardi 10 mars 2009 | 0 commentaires

J'écris sur les aventures des Canadiens de Montréal parce que je crois qu'il y a des leçons pour l'entrepreneuriat et le leadership. Le congédiement de Guy Carbonneau le 9 mars 2009 était peut-être écrit dans les astres. Avec les attentes élevées durant l'année du centenaire, on sentait que la panique était prise dans la direction de l'équipe. Les actions d'hier ne sont que la confirmation de cet état de choses.


L'année dernière, les Canadiens avaient été très chanceux. L'effet combiné du peu de blessures majeures et l'arrivée de jeunes joueurs au sein de quelques vétérans de marque avait surpris bien des clubs. Il n'a fallu qu'une remontée fulgurante de 5 buts en février 2008 face aux Rangers de New York, et l'équipe se croyait visiblement invincible. Malheureusement, les Bruins et ont presque réussit à démolir les chances des Canadiens en première ronde des séries et les Flyers ont finalement eu raison d'eux en deuxième ronde.

Pour certains, la relance de l'équipe en 2007-08 était surprenante et ses difficultés de cette année, encore plus. Pour ma part, je vois une part importante de chance (ou de malchance) dans les résultats de l'équipe. Je crois que c'est la même chose pour à peu près toutes les équipes de la LNH. En fait, depuis l'instauration du plafond salarial en 2005, il semblerait qu'une parité effective s'est installée entre les équipes de la ligue. Les résultats depuis ce temps sont éloquents. Des équipes de bas de classement d'une année se retrouvent en tête de classement l'année suivante. L'inverse se produit aussi. Prenez l'exemple des Penguins de Pittsburgh. L'année dernière, ils se rendent en finale de Coupe Stanley et cette année ils auront du mal à se qualifier pour les éliminatoires. L'année précédente les Sénateurs d'Ottawa se sont rendus jusqu'en finale de Coupe et l'année suivante s'était la débandade.

À mon avis, ce genre de performances sont une indication de parité, car les performances d'une année à l'autre semblent être le jeu du hasard que le fruit d'une stratégie maîtresse, que ce soit dans les bureaux de la direction ou sur la glace.

Donc, à mon avis, c'est maintenant la chance qui détermine les résultats dans la LNH plus que tout autre facteur. Dans ces circonstances, il est difficile de comprendre comment un entraîneur peut être louangé un moment, pour ensuite être déchu quelques jours plus tard. Est-ce que Guy Carbonneau et Michel Therrien étaient vraiment aussi bon qu'on le croyait l'année dernière? Sont-ils vraiment aussi mauvais cette année?

C'est un peu la même chose dans les affaires. La chance joue pour beaucoup dans la survie initiale et la croissance d'une nouvelle entreprise. Nous connaissons des moments difficiles au niveau économique au Québec. La situation pourrait même s'empirer, car il est improbable que l'économie du Québec et du Canada restent à l'abris des déboires financiers et économiques qui affectent la planète tout entière. Est-ce qu'une entreprise fondée en ces temps difficiles pourra survivre? Est-ce qu'une entreprise qui a connu du succès et de la croissance depuis quelques années pourra continuer à prospérer?

Voilà des questions importantes. Les aventures des Canadiens démontrent qu'il faut surtout garder la tête froide et considérer les options réelles qui s'offrent en ces temps d'incertitude et de risque accru. Il faut être prudent. Il ne faut pas jouer la baraque sur un tour de dés. Continuons à investir, surtout dans nous-mêmes et notre personnel clé. Mais il faut aussi garder des réserves, réduire l'endettement et accumuler des réserves de capital afin d'être prêt pour les changements brusques qui nous attendent.

© Richard Martin 2009